Le projet du génome humain a, pour toujours, modifié
la biologie. A la fin des années 1980, une recherche
a été entreprise en vue de séquencer l’ensemble
du génome humain. Ce projet était controversé.
Certaines personnes ont pensé qu’il était
préférable de financer plusieurs travaux de recherche
au lieu de financer un seul grand projet. Mais les travaux pharaoniques
marquent nos imaginations et le projet, approuvé pour
3 milliards de dollars, a débuté en 1990.
C’était un projet risqué
parce qu’en 1990, les capacités technologiques
indispensables pour séquencer et assembler de larges
fragments d’ADN, n’existaient pas encore. En fait,
une grande partie des $3 milliards a été dépensée
pour mettre au point, rapidement et à moindre coût,
les programmes informatiques, les techniques de laboratoires
et les équipements nécessaires à cette
étape première.
Rien de ce genre n’avait été
prévu pour les animaux. Les éleveurs de chevaux
utilisent avec beaucoup de succès et ceci depuis très
longtemps, la sélection génétique. Cependant,
cette sélection associée à la médecine
vétérinaire et la zootechnie n’a pas résolu
tous les problèmes posés par l’élevage
équin. Par exemple, les propriétaires des chevaux
sont toujours demandeurs de vaccins afin d’éradiquer
certaines maladies infectieuses, de traitements adaptés
et efficaces pour vaincre les maladies respiratoires et les
allergies et aussi de plus d’information concernant l’apparition,
le diagnostic et le pronostic des affections liées à
la croissances du Poulain, afin de les prévenir. Tous
ces affections n’ont certainement pas des causes héréditaires
simples, mais beaucoup de chercheurs estiment sur des bases
scientifiques que la connaissance du génome les aidera
à trouver des solutions.
Le projet du génome du cheval est intervenu
après la connaissance du génome humain. Nous savions
alors que la taille et l’organisation du génome
étaient très proches entre les mammifères.
Les programmes, les méthodes et les outils développés
pour le projet du génome humain pouvaient, de ce fait,
être utilisés pour entreprendre le décryptage
génétique de n’importe quel organisme vivant.
Nous pouvions également utiliser cette information du
génome humain pour prédire l’organisation
et la séquence des gènes chez le Cheval.
En octobre 1995, 70 scientifiques de 20 pays
se sont rencontrés à Lexington, Kentucky pour
jeter les bases d’une collaboration ayant pour objet la
cartographie du génome du Cheval. A la fin de cette réunion,
ce projet était élaboré. Puisque aucun
d’entre nous n’avait les ressources pour le faire
seul, nous nous sommes mis d’accord pour construire ensemble
une carte génétique. Pour atteindre ce but, nous
avons partagé nos informations avant leur publication
et encouragé d’autres scientifiques à développer
et utiliser concrètement la carte génétique
ainsi construite. Bien que la compétition amicale, et
parfois malheureusement un peu rude, est soit la norme dans
le monde scientifique, notre collaboration, fondée sur
un large accord, a été remarquable. Cet accord
démontre l’importance que nous donnions à
cette recherche. Nous avions restreint la compétition
à d’autres aspects de la recherche en médecine
équine, et accepter cette étroite collaboration
afin d’aboutir rapidement à la construction d’une
carte génétique du Cheval.

Entre 1995 et 2007, sous les auspices de la
Dorothy Russell Havemeyer Foundation (une organisation consacrée
à promouvoir la recherche en médecine équine),
sept ateliers ont eu lieu, en :
1995 à Lexinton/Kentucky
1997 à San Diégo/Californie
1999 à Uppsala/Suède
2001 à Brisbane/Australie
2003 au Kruger Park/Afrique de Sud
2005 à Newbridge/Irelande
2007 au Lake Tahoe/Californie
Ces ateliers étaient internationaux.
Les scientifiques y participants venaient des USA, du Royaume
Unis, de la France, de l’Allemagne, des Pays Bas, de la
Pologne, de l’Espagne, de la Suisse, de la Suède,
du Danemark, de la Norvège, de la République Tchèque,
de l’Italie, du Portugal, du Japon, de l’Australie,
de la Nouvelle Zélande, de la Chine, de la Corée,
de l’Afrique de Sud, du Brésil et du Canada.
En 1996, le Département de l’Agriculture
américain (USDA) avait invité les participants
du projet à rejoindre les chercheurs travaillant sur
la génomique des autres espèces d’intérêt
agronomique. Ainsi, chaque année depuis 1997 au mois
de janvier à San Diégo (CA), la communauté
scientifique travaillant sur le génome du Cheval, se
rassemble en tant que partie d’un projet national sponsorisé
par l’USDA.
L’objectif initial du projet du génome
du cheval était limité à la construction
d’une carte génétique équine. Les
32 paires de chromosomes furent identifiés et les marqueurs
génétiques localisés sur chacun des chromosomes
afin d’établir un réseau de marqueurs de
référence, en comparaison avec celui du génome
humain. De cette façon, l’information du génome
humain pouvait être utilisée sans entraîner
de coût important du pour le séquençage
du Cheval.
Un autre but du projet était de révéler
les bases génétiques de plusieurs caractères
simples du Cheval comme celles de la couleur de la robe et celles
de certaines maladies héréditaires. Des tests
moléculaires ont ainsi été développés
et sont maintenant commercialement disponibles pour les vétérinaires
et leurs clients, les éleveurs de chevaux. (lien vers
les applications).
Mais ces objectifs ont été fortement
modifiés en 2005. La recherche a montré que les
génomes animaux étaient à la fois plus
simples et plus complexe que ce que l’on pensait initialement.
D’abord, il n’y avait qu’environ 20 000 gènes,
contrairement à ce qui avait été initialement
estimé (entre 100 000 et 300 000). Ces gènes ne
représentent que 2% de l’ADN des chromosomes. Ceci
est stupéfiant parce que nous pensions qu’une fois
la séquence des gènes connue, nous serions capables
de comprendre les secrets de l’hérédité.
En fait, la clé pour comprendre le fonctionnement des
gènes réside dans les 98% du génome qui
ne codent pas pour des gènes et que nous appelons «
l’ADN dépotoir ». Les gènes d’espèces
différentes sont similaires tandis que « l’ADN
dépotoir » est unique pour chaque espèce.
Donc pour comprendre comment les gènes fonctionnent,
nous avions besoin des séquences de « l’ADN
dépotoir » du Cheval.
En juillet 2005, les participants de l’atelier
ont soumis une proposition de projet à l’Institut
National de Recherche sur le Génome Humain (NHGRI) en
décrivant les bénéfices escomptés
du séquençage du génome du Cheval pour
la recherche médicale et vétérinaire. Bien
que le but spécifique du NHGRI soit l’étude
du génome humain, il séquençait alors les
génomes de 24 mammifères pour identifier leurs
similitudes et leurs différences avec le génome
humain. Ces informations identifient des éléments
importants de l’ADN humain pour la compréhension
de son fonctionnement. Dans ce but, des mammifères ont
été sélectionnés de telle sorte
qu’ils représentent les diverses branches de l’arbre
phylogénétique. Les chevaux appartiennent à
la famille des périssodactyles, qui comprend les équidés,
les rhinocéros et les tapirs. Aucun animal de cette famille
n’avait été séquencé et notre
proposition les a convaincu les autorités de choisir
le Cheval.
Dès lors, les travaux ont vite progressé.
Le Broad Institute du MIT et de Harvard, un des centres de séquençage
du NHGRI, était particulièrement intéressé
par le séquençage du génome du Cheval.
En février 2006, le séquençage a commencé
et en juillet le génome entier a été découpé
en 30 000 000 de fragments. La séquence de l’ADN
de chaque fragment a été déterminée.
La prochaine étape était l’assemblage des
fragments dans le bon ordre. Ce qui a été terminé
en janvier 2007 et est actuellement disponible en ligne à
http://genome.ucsc.edu/.
La prochaine phase, qui est la plus intéressante, commence
tout juste. La boîte noire de la génétique
a été entrouverte. Nous espérons que cette
information fournira de nouvelles approches pour résoudre
des vieux problèmes. |